La déficience visuelle touche de 13 à 30% des personnes
âgées. Dans près de 8% des cas, ce déficit est dramatique, se manifestant par
une forte perte de l'acuité visuelle ou même une cécité.
Néanmoins, il est surprenant de constater que très souvent,
les problèmes de vision graves ne sont pas diagnostiqués.
Moins voir la
télévision ou ne plus reconnaître son voisin peut passer totalement inaperçu,
par le malade et par son médecin.
Quelques questions simples, un examen de l'acuité visuelle
et l'application de certaines recommandations, suffiraient pourtant à détecter
et parfois améliorer des troubles dont les répercussions sur la vie quotidienne
sont particulièrement catastrophiques.
Le vieillissement joue sur la vision …
La presbytie est typiquement liée à l'âge. Elle donne aux
gens la furieuse envie de voir leurs bras s'allonger pour lire le journal. La “
lentille ” intraoculaire ou cristallin s'épaissit, devient moins élastique, ce
qui limite son pouvoir d'accommodation.
Le vieillissement normal est également responsable de la
diminution du champ visuel, d'une atténuation de la vision des couleurs
(sombres et pastel) et des contrastes. Il entraîne aussi une gêne accrue dans
la vision nocturne.
Mais moins que certaines maladies
Les principales pathologies oculaires de la personne âgée
sont la Dégénérescence Maculaire de la rétine Liée à l'Age (DMLA), la
rétinopathie diabétique, la cataracte et le glaucome. Dans chacune de ces
maladies, la perte visuelle est réelle, avec des symptômes et des prises en
charges spécifiques.
La DMLA
Responsable de pertes graves de la vision. C'est la vision
centrale qui est perturbée, avec une sensation de brouillage et de distorsion
de l'image.
Quinze pour cent des
personnes de plus de 80 ans sont touchées, en particulier quand elles ont des
antécédents familiaux de cette maladie. Les gens hypermétropes, ceux aux yeux
bleus ou fumeurs, sont exposés également.
Le traitement, quand il est possible, consiste à détruire
avec le laser des vaisseaux anormaux apparus sous la rétine. Mais souvent, il
faudra réapprendre à regarder, en utilisant d'autres points de fixation.
La rétinopathie diabétique
Affection chronique de l'appareil micro circulatoire de la
rétine. Particulièrement crainte, cette maladie est à l'origine de 33% des cas
de cécité chez les personnes âgées diabétiques.
Il s'agit surtout de prévenir
son apparition en régulant au mieux, dès le début de la maladie diabétique, le
taux de sucre dans le sang. L'utilisation du laser permet de limiter les
lésions rétiniennes et de réduire les risques de perte visuelle.
Un consensus conquis
au sein de la Communauté française de Belgique a d'ailleurs été trouvé afin de
favoriser le dépistage des patients diabétiques. Actuellement, en Belgique, une
personne diabétique sur deux ignore qu'elle est atteinte de cette maladie.
La cataracte
Le cristallin s'opacifie. Les causes de ce phénomène sont
multiples : l'âge, les traumatismes, le diabète ou certains médicaments
(corticoïdes, traitement contre le cancer). La cataracte rend sensible aux éblouissements,
elle fait parfois percevoir un halo autour des objets.
Certains collyres peuvent améliorer la gêne, mais c'est
l'intervention chirurgicale, possible sous anesthésie locale, qui permet
l'ablation du cristallin et son remplacement par un implant. La vision est
ainsi efficacement restaurée.
Le glaucome
Augmentation de la pression à l'intérieur de l'œil. Quand le
phénomène est chronique, il est responsable de la diminution du champ visuel en
périphérie.
Il n'est diagnostiqué que par un examen ophtalmologique.
Négligé, car souvent indolore, il peut conduire à la cécité. Son traitement
peut être médical (collyres ou médicaments par voie générale) ou chirurgical.
Le glaucome aigu est quant à lui très douloureux et
s'accompagne d'autres signes (œil rouge, perte visuelle, maux de tête, nausées,
etc.). Il s'agit alors d'une véritable urgence thérapeutique.
Lutter contre la basse vision, c’est adapter l’environnement
Le bilan ophtalmologique doit apprécier le retentissement
des troubles visuels sur les activités de la vie quotidienne. Une fois les
déficits établis, il faut choisir des objectifs et des aides réalistes.
Les aides techniques
Une loupe, associée à un bon éclairage, est déjà d'un grand
recours. D'autres systèmes optiques peuvent s'adapter à la gravité du déficit :
loupe mono ou binoculaire, éventuellement montée sur les lunettes ; prismes
pour augmenter le champ de vision ; télé agrandisseurs (caméra sous laquelle on
dépose un texte ou un livre, permettant de le grossir de 5 à 40 fois).
Ces équipements imposent un apprentissage et obligent à
changer certaines habitudes. C'est pourquoi il vaut mieux les utiliser le plus
tôt possible.
Les “ trucs ” simples qui facilitent le quotidien :
* Adapter dans
toutes les pièces un bon éclairage, évitant les zones d'ombres.
* Utiliser des
codes de couleurs (ranger la soupe de tomate dans une boîte marquée de larges
bandes rouges ou la soupe de poulet dans une boîte marquée de bandes jaunes),
afin d'éviter le recours permanent à une loupe pour lire le contenu des boîtes.
* Utiliser des
lunettes de soleil ou des casquettes à l'extérieur (contre l'éblouissement).
* Ne jamais
laisser les portes entrouvertes ou les chaises dans un passage.
* Faire participer
les aidants. Éviter de dire : “ assoyez-vous ”, mais “ prenez la chaise rouge
contre le mur blanc à votre droite ”.
* Préférer pour le
lieu de vie des couleurs vives, de hauts contrastes.
* Ne pas négliger
l'abord psychologique : la basse vision est un véritable handicap.
Lutter contre la basse vision, c’est d’abord penser que
c’est possible
Les tests d'acuité visuelle faits par le médecin généraliste
sont utiles, mais parfois insuffisants. La rétinopathie diabétique ou la DMLA
ne sont diagnostiquées que lors d'un examen du fond d'œil.
L'académie américaine d'ophtalmologie recommande un examen
ophtalmologique complet une fois entre 35 et 45 ans, puis au moins tous les
cinq ans à partir de 50 ans.
En tout cas, il n'est pas “ normal ” de ne rien voir, quand
on est âgé. Beaucoup de seniors ne portent même plus leurs lunettes, pensant
qu'elles ne serviront plus à grand chose. Pourtant, passer de 1/10 à 2/10,
c'est doubler son acuité visuelle ! (alors que passer de 9/10 à 10/10 n'est
qu'un petit gain).
Dépister et traiter les problèmes à chaque fois que
possible, mieux utiliser la vision résiduelle, stimuler les zones rétiniennes
encore actives, développer les moyens de compensation, c'est l'enjeu. La
qualité de la vie est aussi à ce prix.